Sous le soleil suffocant de cette fin juin,elles paissent tranquillement à l’ombre. Les cinquante vaches prim’holstein et brunes de la ferme du Bois des Moines,à Benon (Charente-Maritime) ont à disposition 70 hectares de vastes prairies et de longues rangées d’arbres pour se rafraîchir,mais leur éleveur,Pierre-Henri Dubois,n’est pas serein pour autant : malgré une production 100 % à l’herbe,un atelier de transformation du lait sur place,beaucoup de vente directe,l’éleveur laitier de 40 ans est en redressement judiciaire depuis fin 2022,une procédure de plus en plus fréquente pour les exploitations agricoles en difficultés.
Installé depuis douze ans,d’abord avec son frère jumeau,puis tout seul,l’éleveur s’est converti au bio en 2017,plus par opportunité que par conviction. « Ce qui nous intéressait,c’était d’être autonomes »,explique-t-il. L’éleveur anticipait alors des débouchés nouveaux après le vote de la première loi EGalim,en 2018,fixant un objectif de 20 % de produits bio dans les commandes des cantines scolaires.
Mais six ans plus tard,le bilan est mitigé : les objectifs d’EGalim sont loin d’être atteints – en Charente-Maritime,moins de 10 % des produits servis dans les cantines sont bio –,et Pierre-Henri Dubois a le sentiment que les commandes sont trop aléatoires,et la concurrence entre agriculteurs trop rude. La multiplication des crises – Covid-19,guerre en Ukraine,inflation,sécheresse record de 2022 – fragilise encore plus la structure. Même si une partie de ses produits s’écoule en circuit court,la moitié de son lait part à la coopérative laitière locale,en beurre conventionnel,et l’éleveur ne se garde guère plus de 900 euros par mois de salaire.
Bien qu’il arbore ce jour-là un tee-shirt noir siglé des Jeunes Agriculteurs,Pierre-Henri Dubois n’adhère plus à un syndicat et ne veut pas rentrer dans des querelles de chapelle,encore moins politiques. Tout juste laisse-t-il entendre qu’il respecte Benoît Biteau pour ses engagements,et que son vote,dimanche,n’ira pas « aux extrêmes ».
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