Le ministre de l’intérieur démissionnaire,Gérald Darmanin,à Paris,le 28 août 2024. STEPHANE DE SAKUTIN / AFP C’est un moyen qui n’avait pas été soulevé jusqu’à présent. Mercredi 4 septembre,Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf vont plaider l’« incompétence » et le « détournement de pouvoir » du ministre de l’intérieur démissionnaire,à l’occasion d’un recours devant le tribunal administratif d’Amiens destiné à faire annuler une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance (Micas) prise à l’encontre de leur cliente,Mélanie L. (le prénom a été modifié,son entourage professionnel n’étant pas au courant de cette mesure).
Les Micas s’apparentent à des assignations à résidence,en fait des restrictions de périmètre de circulation,prises à l’encontre de personnes sorties de prison ou jamais condamnées mais soupçonnées de pouvoir troubler l’ordre public,souvent en lien avec des motifs terroristes.
Selon Gérald Darmanin,559 Micas ont été prononcées à l’occasion de la tenue des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Un chiffre sans précédent depuis l’état d’urgence en vigueur de 2015 à 2017 : les Micas ont remplacé les assignations à résidence à partir de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme de 2017. Chose rare,le ministre de l’intérieur a prononcé des Micas visant des personnes ni condamnées ni même mises en examen,sur la seule foi de « notes blanches » (non signées ni sourcées) des services de renseignement jointes aux demandes.
Dans le cas de Mélanie L.,trois Micas successives ont été prises. La première,le 2 juillet,l’assigne à ne pas quitter sa commune de la Somme. Elle doit toutefois pointer tous les jours à 7 heures au commissariat d’Amiens,« y compris les dimanches,les jours fériés ou chômés ». Le tribunal administratif a partiellement annulé cet arrêté,qu’il a jugé disproportionné : la Micas,à l’origine pour une durée de trois mois,se terminait le 8 septembre,au moment de la clôture des Jeux paralympiques.
Le ministère de l’intérieur fait appel et,dans l’attente du jugement,émet le 30 juillet une deuxième Micas : Mélanie L. est autorisée à se rendre sur son lieu de travail spécifié dans l’arrêté ; son obligation de pointage quotidien est déplacée à 10 heures du matin. Le 26 août,en raison du passage de la flamme paralympique à Amiens,elle est quasiment interdite de tout déplacement. Le 30 août,une troisième Micas est décidée par Beauvau,qui déplace une nouvelle fois l’heure du pointage,à 8 h 15,et autorise Mélanie L.,à partir du 1er septembre,à amener et à chercher sa fille au collège dans une commune voisine. « Cette succession de décisions est particulièrement déstabilisante pour ma cliente,qui tente du mieux qu’elle peut de se réinsérer en travaillant »,plaide Me Ruiz.
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