Il travaille sept jours sur sept,« de 6 h 30 à minuit » et se demande parfois à quoi bon. Depuis 2017,Nicolas Zugno,33 ans,gère avec sa femme un établissement de neuf chambres dans le Jura : l’hôtellerie de charme à la française,division cinq-étoiles,avec parc arboré,restaurant gastronomique,spa et piscine extérieure. Il y emploie six personnes,mais s’inquiète de sa pérennité,dans un contexte concurrentiel qui le dépasse complètement. Son territoire rural compte désormais « plusieurs centaines » de chambres disponibles sur la plate-forme Airbnb,et si son chiffre d’affaires continue de progresser,il s’interroge sur son modèle à charges élevées,« beaucoup moins rentable » que celui des loueurs qui exercent à titre professionnel sur Airbnb.
« On emploie du personnel,on investit dans la sécurité,l’hygiène,les labels,la formation,on se veut garant d’une certaine excellence à la française… Et,à la fin,on se heurte à des modèles ultra-rentables qui n’ont pas besoin d’investir dans tout ça,qui nous créent une concurrence déloyale. On va droit dans le mur »,soupire cet Alsacien,diplômé de l’école de commerce de Troyes. S’il ne se dit pas « contre Airbnb »,il estime que le phénomène a pris trop d’ampleur et qu’il nécessiterait d’être mieux régulé.
Avec vingt-cinq autres hôteliers français – des établissements situés à Deauville (Calvados),Cannes (Alpes-Martitimes),Limoges (Haute-Vienne),Sarlat (Dordogne),Biarritz (Pyrénées-Atlantiques),Strasbourg (Bas-Rhin) ou encore Mâcon (Saône-et-Loire) –,il a assigné l’entreprise à comparaître le 6 septembre devant le tribunal de commerce de Lisieux (Calvados). Ces 26 gérants,soutenus par l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH),le principal lobby de l’hôtellerie en France,demandent des réparations individuelles,pour un total de 9,2 millions d’euros.
Jonathan Bellaiche,l’avocat des vingt-six hôteliers,n’est pas inconnu d’Airbnb. C’est lui qui a défendu l’intercommunalité d’Oléron,et obtenu en avril la condamnation de la plate-forme américaine pour non-respect de ses obligations de collecte de la taxe de séjour. L’entreprise a été sommée de payer à l’intercommunalité une amende de 1,3 million d’euros. En 2017,Jonathan Bellaiche avait également gagné une bataille juridique contre une autre plate-forme américaine,UberPop,au nom de plusieurs chauffeurs de taxi.
Il vous reste 50.47% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
© Affaires Officielles