La place de la Concorde,à Paris,le 16 novembre 2020. JOEL SAGET / AFP L’instant photo aux côtés de la maire de Paris brandissant les douze préconisations sur le réaménagement de la place de la Concorde approchait,quand Jean-Jacques Aillagon,l’ancien ministre de la culture de Jean-Pierre Raffarin,a tenu à faire cet aveu. Quand Anne Hidalgo lui confie,en mars,la présidence de la commission qui doit définir les règles du concours qui permettront de renouer avec le passé du lieu tout en l’adaptant aux étés caniculaires,il ne croit pas une seule seconde à cette idée d’y planter des arbres. « Un contresens » : la place royale doit rester minérale comme elle l’a toujours été,assène-t-il. Mardi 18 juin,ce spécialiste de l’histoire de l’art a reconnu son erreur. La Concorde,plus vaste rond-point parisien,doit être végétalisée pour s’adapter au climat,mais aussi rappeler son histoire.
Cette étendue telle qu’on la connaît,plane,grise et pavée,n’est en réalité qu’une courte parenthèse dans la vie du site. La direction des affaires culturelles de la ville a retrouvé plans,peintures,photos. Les dimensions sont intactes : 7,79 hectares qui s’étendent des Tuileries aux Champs-Elysées,de l’ambassade des Etats-Unis à la Seine. Mais lorsque,au XVIIIe siècle,l’architecte Ange-Jacques Gabriel dessine l’esplanade qui doit accueillir la statue du roi,il borde cet ancien terrain vague de fossés.
Très vite,ces derniers sont aménagés,deviennent des jardins. Un siècle plus tard,le concours organisé pour rénover les lieux demande de les préserver. Jusqu’à ce que Napoléon III,en 1852,les juge « dangereux et dommageables à la circulation grandissante » et ordonne de les combler. L’avènement de l’automobile transforme alors la place royale en gigantesque anneau routier.
Cette recommandation,comme les autres,fut adoptée à l’unanimité. Dix d’entre elles – les deux autres relèvent d’une charte – doivent figurer dans le cahier des charges du concours d’architecture lancé fin mai. Les cinq équipes seront désignées en septembre,le lauréat connu en janvier,pour un début de travaux espéré en 2026.
La méthode retenue est inédite. Plutôt que de risquer de voir le projet lauréat amendé par les commissions patrimoniales,la Ville a préféré prendre les devants en allant chercher l’avis autorisé de tout un écosystème. Le procédé a eu le mérite de réunir,à cinq reprises,dix-neuf spécialistes du patrimoine et du climat,dont les positions ne sont pas toujours raccord. Stéphane Bern,un architecte en chef des Monuments historiques,une inspectrice générale des affaires culturelles ont ainsi dû s’entendre avec deux membres du GIEC,le comité d’experts sur le climat,ou encore Alain Baraton,le jardinier en chef de Versailles. L’équation soumise était complexe. Il s’agissait de concilier adaptation et préservation d’un site doublement classé,au titre des Monuments historiques et au Patrimoine de l’Unesco.
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